Tes mains dans les miennes

Tes mains sont dans les miennes. Tes mains encore toutes petites, même si elles ont tant grandies. Mes yeux cherchent les tiens et ma bouche te dicte de me regarder.

Tout en pressant tes petites mains, je croise enfin ton regard. Je respire doucement, mais fortement. Tu suis ma respiration. Ensemble, nous inspirons. Ensemble, nous expirons.

Tranquillement, ton regard s’adoucit et se fond au mien. Il devient de plus en plus rassurant, de plus en plus présent.

Tu es maintenant là, ici, avec moi.

Quelques secondes avant, je t’avais perdu; encore une fois.

Maintenant, on est ici, ensemble, et tu reviens. Tu me reviens; tu te reviens.

Ensemble, on te calme. Ensemble, on se calme.

Tu te rappelles, maintenant, comment respirer.

 

L’anxiété.

C’est grand pis c’est rien. C’est le mal du siècle, à ce qu’on dit.

L’anxiété; un mot drôle qui en fait ne l’est pas du tout.

L’anxiété; le mot qui te fait réaliser qu’il a pris le contrôle de plein de gens avant toi. Un mot qui cause plusieurs maux,  qui se transmet  de génération en génération. Il est dans ma famille et dans celle de ton papa. Il est dans toi; notre famille.

 

Tu as sept ans.

Tu ne dors pas la nuit.

Tu es habité, depuis toujours, par des peurs différentes, que pleins de gens, même proches de toi, ne comprennent pas.

Tu te contrôles tant que tu le peux. Pis parfois, c’est trop.

 

Tu es un volcan.

Tu es  un presto. (C’est moins poétique, mais c’est plus juste)

Tu te remplis de beau, tu te remplis de laid, tu te remplis de toutes les émotions qui passent.

Et parfois, s’en est trop.

 

Parfois,  c’est rien, mais c’est tout ce qui t’entoure qui pourrait tout t’enlever le beau et le précieux que tu possèdes. Ce que les autres appellent « rien » qui devient ton tout. Ya pas rien là et puis non, ça ne passera pas.

Comme cette peur irrationnelle que notre maison brûle, qui t’empêche de dormir, nuit après nuit.

Je sais, c’est irrationnel. Et tu le sais. Mais c’est plus fort et plus présent que tout.

Comme toutes  les autres peurs si réelles qui te paralysent et t’empêchent de dormir, d’avancer ou de juste passer une belle journée.

 

Alors, quand ton volcan explose, quand toute la vapeur accumulée dans ton presto sort, si je suis là, je prends tes mains.

Je les presse, je les masse, comme j’ai appris à le faire, jadis. Ô combien cette technique est utile!

Ça, je l’ai apprise.

Mais pas le reste.

Je n’ai pas appris que ton mal était vrai; je le sais.

Je n’ai pas appris comment  t’expliquer ce que tu vis, je l’ai su.

 Je n’ai pas appris que toutes ces peurs n’étaient pas des caprices; je t’ai cru.

Je n’ai pas appris à trouver des solutions à tes maux; j’essaie.

 

J’essaie fort, mon enfant. Si fort.

Tout comme toi, qui essaie chaque jour, de vivre une belle journée, j’en suis certaine.

 

Alors même si ce mot avec une consonance particulière vit en en toi, je t’aiderai toujours à respirer doucement et surtout, je t’aiderai à le comprendre.

Toujours, j’essaierai de t’aider à t’aider toi-même.

Ensemble, avec nos forces, tu avanceras aussi loin que tu le voudras, sans que je sois toujours à tes côtés.

Tu sais mon enfant, une des choses les plus difficiles, quand tu es une maman, c’est de ne pas se remettre en questions. De croire et faire confiance en ce que tu sais.

Et ce que je sais, c’est que oui, tu as besoin d’aide. Alors oui, je t’aiderai et je mettrai les bonnes personnes sur ta route pour continuer à t’aider.

Parce que je sais, mais je ne sais pas tout.

 

Pour le moment, mes mains tiennent tes mains, ton regard se fond au mien et doucement, tu te rappelles comment respirer. C’est tout ce qui compte.

Caroline Gauthier